La nouvelle édition du « Global Trends, » l’étude prospective préparée par le renseignement US tous les quatre ans à l’attention de la nouvelle administration, prévoit un déclin de la domination américaine, désormais confrontée aux nouvelles puissances montantes des BRIC, ainsi que des risques accrus de conflits provoqués par la raréfaction des ressources.
BBC, 21 novembre 2008
La domination économique, militaire et politique des États-Unis devrait vraisemblablement diminuer au cours des deux prochaines décennies, estime un nouveau rapport des services de renseignement américain portant sur les perspectives mondiales.
Le National Intelligence Council (NIC) prévoit que la Chine, l’Inde et la Russie contesteront de plus en plus l’influence des États-Unis.
Il avertit également que le dollar pourrait n’être plus la principale devise internationale, et que les pénuries de nourriture et d’eau vont alimenter les conflits.
Toutefois, le rapport reconnaît que la réalisation de ces prévisions n’est pas une fatalité et dépendra des actions entreprises par les dirigeants du monde entier.
Intitulé « Tendances Mondiales 2025, » ce document préparé tous les quatre ans par le NIC est publié au moment où le nouveau président entre en fonction. Sa lecture s’annonce assez sombre pour Barack Obama, indique Jonathan Beale, le correspondant de la BBC à Washington, tant il dresse un tableau pessimiste pour l’avenir de l’influence et de la puissance des États-Unis.
« Les 20 prochaines années de transition vers un nouveau système sont lourdes de risques », indique le rapport. Washington devrait conserver son avantage militaire considérable, mais les progrès scientifiques et technologiques, l’usage de « tactiques de guerre irrégulière », la prolifération des armes de précision de longue portée, et l’usage croissant de la cyber-guerre « limiteront de plus en plus la liberté d’action des Etats-Unis ».
Néanmoins, les auteurs concluent que « Les États-Unis demeureront le principal acteur, mais seront moins dominants. »
Le rapport 2004 du NIC dépeignait un tableau plus optimiste de la position de l’Amérique à l’échelle mondiale, estimant que la domination des États-Unis devrait se poursuivre.
Mais cette nouvelle édition indique qu’avec la montée en puissance des économies de la Chine, l’Inde, la Russie et du Brésil les États-Unis auront à faire à plus de concurrence au sommet d’un système international multi-polaire.
L’Union européenne y est décrite comme devenant un « géant entravé », incapable de tirer parti de sa puissance économique au plan diplomatique ou militaire.
Un monde aux plus nombreux centres de pouvoir sera moins stable que celui où n’existaient qu’une ou deux superpuissances, occasionnant plus de possibilités de conflit, constate le NIC.
Le réchauffement de la planète, la croissance démographique et la croissance économique créeront des tensions supplémentaires sur les ressources naturelles et alimenteront des conflits dans le monde entier lorsque les nations entreront en concurrence pour s’en assurer l’accès.
« Les rivalités stratégiques vont vraisemblablement porter sur les domaines du commerce international, des investissements, de l’innovation technologique et de son acquisition, mais nous ne pouvons pas exclure un scénario semblable à celui du 19ème siècle, fait de course aux armements, d’expansion territoriale et de rivalités militaires », indique le rapport.
« Des types de conflits que nous n’avons pas connus depuis un certain temps - comme ceux portant sur les ressources - pourraient réapparaître. »
Ces conflits, et la pénurie de ressources pourraient provoquer l’effondrement de gouvernements en Afrique et en Asie du Sud, et la montée de la criminalité organisée en Europe centrale et orientale, ajoute-t-il.
L’emploi des armes nucléaires sera de plus en plus probable, dit le rapport, car les « Etats voyous » et les groupes militants peuvent y accéder plus facilement.
Mais Al-Qaida pourrait décliner « plus tôt qu’on ne le pense », ajoute-t-il, en soulignant l’impopularité croissante de ce groupe dans le monde musulman.
« La perspective qu’Al-Qaida fasse partie du petit nombre de mouvements capables de s’installer sur le long terme n’est pas élevée, compte tenu de son intransigeance idéologique, de ses objectifs stratégiques irréalisable et de son incapacité à devenir un mouvement de masse », indique-t-il.
Le NIC estime que les dirigeants disposeront d’une certaine latitude pour prendre des mesures afin de prévenir l’apparition de nouveaux conflits.
« Traiter et atténuer ces problèmes, sinon les résoudre, n’est pas au-delà des capacités des êtres humains, des systèmes politiques, [ou] dans certains cas, [...] des mécanismes du marché », a déclaré Thomas Fingar, le directeur du NIC.
Pour autant, il n’est pas inutile de se rappeler, comme le note notre correspondant, que les renseignements américains se sont déjà trompés par le passé.
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